Rusizi, Rwanda
Agรฉe de 40 ans, elle vivait ร Kamanyola, localitรฉ de la province du Sud-Kivu, prรจs des frontiรจres rwandaise et burundaise, lorsqu’une bombe a dรฉtruit sa maison.
Situรฉe ร quelque 70 km ร vol d’oiseau au nord d’Uvira, citรฉ conquise ces derniers jours par le M23, Kamanyola est passรฉe depuis avril sous contrรดle de ce groupe armรฉ antigouvernemental soutenu par Kigali et son armรฉe. Mais ces derniers jours, selon ses habitants rรฉfugiรฉs au Rwanda, la ville a รฉtรฉ bombardรฉe par les belligรฉrants, faisant de nombreuses victimes.
“Beaucoup de gens sont morts, jeunes et vieux. J’ai vu des cadavres en fuyant, j’en ai enjambรฉ certains. J’ai dรฉcidรฉ de passer au Rwanda avec les autres”, raconte Akilimali Mirindi depuis le camp de rรฉfugiรฉs de Nyarushishi, dans le district de Rusizi, dans le sud-est du Rwanda.
Le M23 contrรดlait vendredi Uvira, ville stratรฉgique peuplรฉe de centaines de milliers d’habitants.
Selon l’ONU, plus de 200.000 personnes, en grande majoritรฉ des civils, ont รฉtรฉ dรฉplacรฉes dans l’est de la RDC depuis le lancement dรฉbut dรฉcembre d’une nouvelle offensive du M23 dans le Sud-Kivu.




– accord “miracle”
La conquรชte d’Uvira par le M23, qui affirme dรฉfendre les intรฉrรชts des populations tutsi de la rรฉgion, intervient prรจs d’un an aprรจs une autre offensive รฉclair qui lui avait permis de s’emparer entre janvier et fรฉvrier des deux grandes villes de l’est de la RDC, Goma et Bukavu.
Elle arrive juste aprรจs l’accord “pour la paix”, signรฉ le 4 dรฉcembre ร Washington par les prรฉsidents de la RDC Fรฉlix Tshisekedi et du Rwanda Paul Kagame, en prรฉsence de leur homologue amรฉricain Donald Trump qui avait qualifiรฉ ce texte de “grand miracle”.
“Il est clair qu’il n’y a pas d’entente entre Kagame et Tshisekedi”, dรฉplore Thomas Mutabazi qui a lui aussi fui les combats, “s’ils ne parviennent pas ร s’entendre, la guerre continuera.”
“Les bombes pleuvaient sur nous de toutes parts”, aussi bien celles des forces armรฉes de la RDC et de leurs alliรฉs burundais que celles du M23, affirme ce rรฉfugiรฉ de 67 ans, “nous avons dรป quitter nos familles et nos champs. Nous ne savons rien, mais nous et nos familles subissons de plein fouet les consรฉquences de la guerre”.
Le camp de rรฉfugiรฉs, qui accueille environ un milliers de personnes, est situรฉ sur une colline bordรฉe de plantations de thรฉ.ย De nombreuses ONG, ravitaillรฉes notamment par le Programme alimentaire mondial (PAM), sont prรฉsentes sur place.
– Enfants tuรฉs –
Jeanette Bendereza, 37 ans, avait dรฉjร fui son domicile ร Kamanyola une premiรจre fois cette annรฉe, avant que le M23 n’en prenne le contrรดle. Elle s’รฉtait rรฉfugiรฉe au Burundi en fรฉvrier avec ses quatre enfants.
“Nous sommes revenus quand on nous a dit que la paix รฉtait revenue”, tรฉmoigne-t-elle.
Mais l’accalmie fut de courte durรฉe.
“On รฉtait habituรฉs ร quelques balles, mais trรจs vite, les bombes ont commencรฉ ร pleuvoir, lancรฉes par les troupes burundaises”, raconte-t-elle, “c’est ร ce moment que nous avons pris la fuite”.
Le Burundi, qui entretient des relations tendues avec le Rwanda, avait envoyรฉ des troupes soutenir l’armรฉe de la RDC contre le M23, mais avec la prise d’Uvira le groupe armรฉ contrรดle dรฉsormais l’ensemble de la zone bordant sa frontiรจre terrestre.
“On entendait les bombes nous poursuivre”, raconte Jeanette Bendereza, affirmant ne pas savoir oรน se trouve son mari et n’avoir aucun moyen de le contacter, car elle a perdu son tรฉlรฉphone portable dans sa fuite.
Olinabangi Kayibanda, 56 ans, a pensรฉ rester ร Kamanyola au dรฉbut des combats. “Mais quand on a commencรฉ ร voir des gens mourir, d’autres รชtre mutilรฉs par les bombes (…) – mรชme des enfants mouraient -, alors on a dรฉcidรฉ de fuir”, se remรฉmore-t-il.
Avant de lรขcher: “J’ai vu une voisine tuรฉe dans le bombardement de sa maison. Elle est morte avec ses deux enfants. Elle รฉtait enceinte.”
Humaniterre avec AFP






