Mercredi 08 mai 2024
Kenya- Burundi- Brรฉsil- Dubaรฏ- Somalie- Chine
Par Nick Perry
Au Kenya, en Chine, ร Dubaรฏ, ou encore au Brรฉsil et en Somalie, des inondations dรฉvastatrices ont frappรฉ des centaines de milliers de personnes.
Si toutes ne sont pas directement liรฉes au rรฉchauffement climatique, elles interviennent en pleins records de chaleur, illustrant l’avertissement des scientifiques: le changement climatique accentue la frรฉquence et l’intensitรฉ des phรฉnomรจnes mรฉtรฉorologiques extrรชmes.
Car le changement climatique ne se limite pas ร une hausse des tempรฉratures, il implique aussi toute une sรฉrie d’effets liรฉs ร l’excรจs de chaleur stockรฉ dans l’atmosphรจre et dans les ocรฉans, ร cause des rejets de gaz ร effet de serre de l’humanitรฉ, dont le dioxyde de carbone (CO2).
“Les prรฉcipitations extrรชmes rรฉcentes sont conformes ร ce que l’on attend dans un climat de plus en plus chaud”, explique ร l’AFP Sonia Seneviratne, membre du Giec, le groupe d’experts du climat mandatรฉs par l’ONU.
Des ocรฉans plus chauds s’รฉvaporent plus; et un air plus chaud peut accueillir plus d’eau: pour un degrรฉ de plus, l’atmosphรจre peut se gorger de 7% d’humiditรฉ en plus.
“Ceci entraรฎne des รฉpisodes pluvieux plus intenses”, a notรฉ Davide Faranda, spรฉcialiste des phรฉnomรจnes mรฉtรฉorologiques extrรชmes au CNRS.
Au Pakistan en avril, il a plu au moins deux fois plus qu’en moyenne, avec mรชme 437% de plus pour une province. A Dubaรฏ, la pluie de deux annรฉes normales est tombรฉe en seulement une journรฉe.
– “Atmosphรจre assoiffรฉe” –
Toutes les rรฉgions du globe ne deviennent pas plus humides pour autant.
“Une atmosphรจre plus chaude, plus assoiffรฉe, est plus efficace pour absorber l’humiditรฉ d’une rรฉgion et pour redistribuer cet excรจs d’humiditรฉ sous forme de tempรชtes ailleurs”, selon Richard Allan, de l’universitรฉ de Reading, en Angleterre.
De quoi entraรฎner plus de pluies ร certains endroits, mais aussi des sรฉcheresse et canicules plus intenses ร d’autres, explique-t-il.
Les variations climatiques naturelles influencent aussi les prรฉcipitations. C’est le cas du phรฉnomรจne cyclique naturel El Niรฑo au-dessus du Pacifique, connu pour son effet rรฉchauffant qui alimente depuis prรจs d’un an les records de tempรฉratures mondiales, mais aussi les pluies extrรชmes dans certains pays, dont le Pรฉrou et l’Equateur.
Toutefois, malgrรฉ les variations naturelles, “la hausse observรฉe, sur le long terme, des fortes prรฉcipitations est due au changement climatique induit par les humains”, souligne Mme Seneviratne.
– Inadaptation –
Toutes les inondations ne sont pas attribuables au changement climatique, dont l’influence sur chaque รฉvรฉnement doit รชtre examinรฉ au cas par cas.
Mais les scientifiques disposent aujourd’hui de mรฉthodes permettant de comparer rapidement un รฉpisode actuel de pluies extrรชmes, de canicule ou de sรฉcheresse, ร la probabilitรฉ qu’il survienne dans un monde sans changement climatique.
Pionniers de cette approche, le rรฉseau World Weather Attribution (WWA) a conclu que les pluies diluviennes aux Emirats Arabes Unis et ร Oman en avril รฉtaient “trรจs probablement” exacerbรฉs par le rรฉchauffement climatique, essentiellement causรฉ par la combustion des รฉnergies fossiles.
ClimaMeter, qui utilise une mรฉthodologie diffรฉrente, estime que les inondations d’avril en Chine รฉtaient “probablement influencรฉes” par la conjonction du changement climatique et d’El Niรฑo.
“Il peut รชtre difficile de distinguer le rรฉchauffement climatique des fluctuations naturelles” et cela est plus รฉvident pour certains รฉvรฉnements mรฉtรฉorologiques que pour d’autres, dit Flavio Pons, un climatologue qui a รฉtudiรฉ les inondations chinoises.
Pour les inondations au Brรฉsil, ClimaMeter estime que le changement climatique est le premier responsable de l’intensification des pluies, sans influence significative d’El Niรฑo.
Beaucoup des pays les plus touchรฉs par les inondations, comme le Burundi, l’Afghanistan et la Somalie, sont parmi les plus pauvres et moins รฉquipรฉs pour faire face aux pluies diluviennes.
Mais l’รฉpisode de Dubaรฏ a dรฉmontrรฉ que des pays riches n’รฉtaient pas assez prรฉparรฉs non plus.
“Nous savons qu’un climat plus chaud favorise les รฉvรฉnements mรฉtrologiques extrรชmes, mais nous ne pouvons pas prรฉdire exactement quand et oรน cela aura lieu”, a soulignรฉ Joel Hirschi, du centre ocรฉanographique national britannique.
“Les prรฉparatifs actuels sont insuffisants”, a-t-il soulignรฉ, alors qu’il est “moins cher d’investir aujourd’hui” que d’attendre.
Humaniterre avec AFP