Nations unies, États-Unis
Vendredi 10 octobre 2025
Par Amélie BOTTOLLIER-DEPOIS
“Nous allons devoir rapatrier, réduire d’environ 25% le nombre de nos effectifs de maintien de la paix militaires et policiers, ainsi que leur équipement, et un nombre important d’employés civils des missions vont également être touchés”, a indiqué ce responsable sous le couvert de l’anonymat.
Cela signifie le départ de 13.000 à 14.000 soldats et policiers, a-t-il précisé. Compte tenu de la coordination nécessaire avec les pays contributeurs de troupes, le rapatriement pourrait commencer “d’ici six semaines” et s’étendre sur “12 à 18 semaines”.
Le budget des opérations de maintien de la paix pour la période juillet 2025-juin 2026 est d’environ 5,4 milliards de dollars, dont 1,3 milliard devant venir des Etats-Unis et 1,2 milliard de la Chine.
Mais depuis l’installation de la nouvelle administration, Washington a annoncé des coupes massives dans son aide à l’étranger, réduisant notamment drastiquement ses financements de programmes humanitaires et d’agences spécialisées des Nations unies.
L’ONU attendait jusqu’alors les décisions concernant les opérations de maintien de la paix, qui accusaient déjà en juillet un total de 2 milliards de dollars d’arriérés de contributions.
Les Américains l’ont désormais informée qu’ils ne contribueraient pour le budget 2025-2026 qu’à hauteur de 682 millions de dollars, dont 85 millions de dollars réservés pour le futur bureau de soutien de l’ONU à la nouvelle mission internationale antigangs en Haïti, selon le responsable onusien.
Sur le total, l’ONU s’attend ainsi à un déficit de 16 à 17% du budget de maintien de la paix en cours.
Dans l’attente de la décision américaine, les missions de maintien de la paix de l’ONU avaient préparé des plans pour anticiper divers scénarios de baisse de financements, jusqu’à imaginer un retrait total américain.
– “Très mauvais signal” –
Mais si le pire scénario a été évité, “nous n’avons pas d’autre choix que d’appliquer les plans pour empêcher un effondrement financier des opérations et évidemment nous regrettons profondément d’avoir à le faire”, a insisté le responsable onusien.
La baisse de 25% des troupes s’appliquera à neuf des onze missions de maintien de la paix. Les deux autres, qui comptent peu d’effectifs, sont financées par un autre budget.
En plus du rapatriement des Casques bleus et des équipements, l’ONU devra organiser le cas échéant la remise en état environnemental de sites abandonnés ou le transfert du contrôle des bases d’opérations aux autorités locales.
“Nous savons qu’il y aura des conséquences en termes de surveillance des cessez-le-feu, de protection des civils, de travail avec les humanitaires”, a noté le responsable, prédisant un impact “important” sans pouvoir l’évaluer plus en détails.
Les missions concernées sont celles déployées notamment dans l’est de la République démocratique du Congo, dans le sud du Liban, en Centrafrique, au Soudan du Sud ou encore au Sahara occidental.

“L’impact sur le terrain va dépendre. A Chypre (…), une réduction du personnel sera énervant mais ne fera pas une grosse différence”, estime de son côté Richard Gowan, de l’International Crisis Group.
“Mais dans des endroits comme le Soudan du Sud, où les soldats de la paix offrent un peu de protection à beaucoup de civils et où une nouvelle guerre a presque éclaté cette année, réduire les Casques bleus envoie un très mauvais signal”, a-t-il déclaré.
Et “cela ridiculise le Conseil de sécurité qui fixe les niveaux de déploiement de personnel des missions de l’ONU”.
Humaniterre avec AFP